Séquestration de citoyens en plein jour
Alger, ville interdite aux Algériens, le 21 mai 2011
Séquestration de citoyens en plein jour
Alger, capitale d’un pays au million et demi de martyrs, avait grise
mine en ce samedi 21 mai 2011. Le temps était maussade et pluvieux
depuis quelques jours en cette Mecque, jadis des révolutionnaires…
Surprenante sera mon aventure en cette matinée printanière. Alors que
je déambulais sous les arcades de l’avenue Belouizdad en direction de
la place du 1er mai, je tombai nez à nez, à 10h40, avec un ami qui
était en compagnie d’un officier de police. Sans préjugé et par
politesse, j’ai salué son compagnon, l’officier de police. Grande fut ma
surprise lorsque l’officier de police en question m’invita en
compagnie de « son compagnon » à entrer à l’intérieur du couloir d’un
bâtiment dont la porte était fortement gardée par des policiers
d’intervention. On lui rappelant que je ne faisais que déambuler dans la
rue, les mains dans les poches : l’officier s’en alla et un des agents
d’intervention me poussa à l’intérieur du bâtiment. Un monsieur y était
déjà séquestré avant qu’on le soit. Aucun des policiers n’a daigné me
dire pourquoi on me séquestre dans un couloir anonyme, d’un bâtiment
bien habité, privé. Quelques minutes après, un autre monsieur y a été
aussi poussé sans ménagement à l’intérieur. Mon premier compagnon de
séquestration, malade chronique, fit sortir quelques locataires
dérangés par ses cris de révoltes. En échangeant leurs réflexions sur
cet incident, un des policiers dira à ses collègues « laissez-les qu’ils
les massacrent avec des bouteilles » !
Alger, la Mecque des révolutionnaires serait-elle gérée par des émules
de « Papa doc » au point où des citoyens sont interdits de déambuler
dans la rue un samedi matin, ou pire encore ils peuvent être séquestré
en tout lieu, à tout moment et par n’importe quel énergumène qui pisse
sur la République d’un million et demi de martyrs ?
Mon compagnon d’infortune usa de son portable pour informer des amis
dont le député du RCD, Tahar Besbes. Celui-ci a fini par nous
localiser. Il nous a rejoints dans le fameux couloir de séquestration,
accompagné d’un officier de police. Il tenta de faire raisonner, en
vain, l’officier. Il fit comprendre à ce dernier que ces citoyens
n’avaient pas à être séquestrés de cette manière à supposer qu’ils
aient enfreint la loi, car des postes de police existent à cet effet.
L’officier en question s’éclipsera quand le député demandera à ce qu’on
nous laisse partir. La réponse fusera d’un agent de police, surement
grisé sa tenue : Toi, tu es un cadre, tu peux partir pas eux! Cette
réflexion me fit sortir de mon calme pour m’en prendre à cet énergumène
auquel le général Hamel aurait donné des droits pour n’en seulement me
séquestrer mais aussi et surtout toucher à ma dignité de citoyen. Aux
yeux de cet énergumène, je ne serais même un sujet mais un esclave…dans
un pays d’un million et demi de martyrs.
Le député Besbes resta avec nous, séquestré dans le couloir du bâtiment.
Les policiers se retirèrent des lieux à midi, sans se retourner
derrière eux. Ils s’en allèrent sans se préoccuper de nous, honteux de
leurs nouvelles besognes ( ?) qui n’ont absolument rien avoir avec le
droit et certainement pas avec l’Etat de droit.
Ce comportement d’agents de « police » s’est produit dans la Capitale
d’Algérie, la Mecque des révolutionnaires, le jour où débutent les
consultations sur les reformes politiques et bien après l’annonce de
levée de l’état d’urgence. Quel crédit donner aux gesticulations du
pouvoir sur ces effets d’annonce de démocratisation, de liberté, de
justice si ce n’est plaire à leurs maitres d’ailleurs ? Même durant la
décennie rouge, j’ai eu à faire des sit-in dans cette même daïra de
Sidi M’hamed, sans être séquestré, pour dénoncer le suicide de deux
lycéens au lycée El Bedjaoui d’El Madania, la fermeture par décret de
monsieur le chef du gouvernement Benflis du CEM Said Ibn Moussib. Ce
CEM, éloigné de quelques dizaines de mètres du couloir de
séquestration, a été réouvert par décret d’annulation du décret de sa
fermeture…
Le président-fondateur de l’Union des parents d’élèves de la wilaya d’Alger
S. Amer-yahia